Proust contre la déchéance, Joseph Czapski, 2011-06-23, 4.5 étoiles

Faut-il lire Proust ?

Joseph Czapski, officier polonais, avait miraculeusement échappé au massacre de Katin. En 1939 il était détenu dans un camp de déportation en Russie, avec quelque centaines d'autres officiers. Dans des conditions de détention extrêmement pénibles, ceux-ci luttèrent contre la déchéance en organisant des conférences clandestines. Czapski, francophile et fin lettré, improvisa des conférences sur la littérature française, et en particulier sur Proust dont il était un grand admirateur. Ce livre contient le manuscrit de ces conférences clandestines

Ce qui est remarquable, c'est que Czapski a fait ces conférences sans avoir les livres de Proust ni aucune note ou documentation sous la main. Ainsi, lorsqu'il cite Proust, il le fait de mémoire, et c'est très intéressant car on a alors du Proust ré-écrit par Czaspski (dans ce cas l'éditeur met la citation exacte de Proust en bas de page). Czapski explique comment il a découvert Proust, comment il est venu à aimer son oeuvre. Surtout, il donne des précieuses clés d'accès à celui qui, comme moi, n'a pas encore "osé" aborder Proust dans le texte. J'ai trouvé certains passages remarquables : quand Czapski montre la virtuosité de Proust dans la scène de la mort de la grand-mère du narrateur. Même Tolstoï n'avait pas si bien décrit les sentiments face à la mort, nous explique-t-il. Même chose lorsque Czapski disserte sur la manière dont Proust avait su comprendre et expliquer le jeu des relations sociales, ou encore les sentiments de l'amant délaissé,.. wp> C'est un livre a deux voix : la voix d'un officier Polonais emprisonné en Russie par des froids polaires fait écho à celle de Proust, qui était malade au moment ou il écrivait son oeuvre magistrale, et qui se réfugiait dans une petite chambre surchauffée et isolée avec du Liège pour protéger ses nerfs de tout bruit extérieur. Je trouve que ce livre est idéal pour celui qui comme moi hésite devant la momumentalité de l'oeuvre avant d'entrer dedans. Faut-il Proust ? En lisant Czapski, je me dis que ce serait bête de ne pas le faire, car nous dit l'auteur "Proust apporte au lecteur, à travers sa forme révélatrice, un monde d'idées, toute un vision de la vie qui, en réveillant dans le lecteur toutes ses facultés de pensées et de sentiments, exige de lui une révision nouvelle de toute son échelle de valeur".

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