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Un autre monde : Contre le fanatisme du marché, Joseph-E Stiglitz, 2007-02-10, 4.0 étoiles
La mondialisation
Pour les économies prospères, la mondialisation est principalement vue comme une menace en terme d'emplois (les délocalisations) : et c'est vrai que le salaire des ouvriers des pays pauvres devrait augmenter et celui des pays riches descendre, pour arriver à un équilibre. Ce qui ne va pas se faire sans un accroissement des inégalités en défaveur des travailleurs les moins qualifies principalement. Pour les pays pauvres la mondialisation est perçue à travers le filtre des pratiques de commerce inéquitable, du fardeau de la dette, et autres méfaits des pays riches envers les pays pauvres. Bref des deux côtés on peut dire que la mondialisation n'a pas bonne presse et qu'elle est plus vécue comme une menace que comme une opportunité.
Mais qu'est-ce que la mondialisation, quels sont les enjeux et les problèmes majeurs, qu'est-ce que L'Uruguay round, l'OMC ? Finalement l'opinion publique ne sait que peu de chose. C'est pourquoi ce livre de vulgarisation, écrit par un prix Nobel d'économie et ancien directeur de la banque mondiale, devrait permettre à tout un chacun de s'élever au-dessus du niveau du café de commerce lors d'une prochaine discussion sur la mondialisation !
L'auteur montre que la mondialisation fut un échec principalement à cause d'une absence d'encadrement politique. Le sous-titre est clair : il est un opposant du libéralisme exacerbé et prône une régulation forte du marché par les états. Il en revient à ce bon vieux Keynes et s'oppose fortement aux fanatiques du FMI et de la banque mondiale, coupable de bien des maux dans les pays en voie de développement.
En une dizaine de chapitres, Stiglitz explore les raisons de l'échec et propose des correctifs. C'est parfois très intéressant ; les négociations opaques et défavorables aux pays pauvres dans le cadre de l'OMC, les distortions du commerce international (protectionisme, subsides, ... en passant, savez-vous que chaque vache européenne bénéfice de deux dollars de subside ? Autant dire qu'il vaut mieux être une vache en Europe qu'un africain...), les dérives en terme de brevets, le danger du pouvoir concentré dans les multinationales (une multinationale pèse parfois plus que tout les pays d'Afrique avec lesquels elle traite), l'opacité et la mauvaise gouvernance des institutions internationales, les enjeux écologiques, le problème des réserves mondiales et de l'instabilité financière... Il y a aussi un chapitre bien fait sur le problème de la dette des pays pauvres et les bonnes raisons pour la supprimer dans certains cas.
En résumé, il s'agit d'un livre complet par un économiste résolument anti-FMI et partisan d'une économie de marché fortement encadrée par l'état. Il insiste fortement sur l'importance d'un système de gouvernance mondial qui soit démocratique (c'est loin d'être le cas). Ce livre est la preuve à nouveau qu'il ne s'agit pas de choisir entre le marché d'un côté et le communisme de l'autre : il y a de la marge entre les deux. On peut reprocher à l'auteur de procéder trop par accumulation d'exemples, en cassant chaque fois du sucre sur le FMI au passage. Je pense que c'est le prix à payer pour la vulgarisation. Au final on en ressort un peu découragé et le crédit des économistes du FMI et de la banque mondiale est encore un peu plus écorné (c'est un euphémisme). Je me demande qui peut encore prendre les économistes au sérieux, il est tout à fait clair que les décisions importantes dans le commerce international ont une portée essentiellement politique et que sous couvert de légitimité économique on cherche en fait à assoir des intérêts économiques privés au détriment de valeurs importantes d'équité, d'environnement, etc... et que tout cela se fait de manière largement anti-démocratique (les intérêts privés des plus forts prédominent).
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